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Interview exclusive: Le Journal du Pays rencontre Atoute César Badiate au coeur du maquis casamançais

Interview exclusive: Le Journal du Pays rencontre Atoute César Badiate au coeur du maquis casamançais

Ces derniers temps, plusieurs  fausses informations faisant état d’actes posés ou de prise position de la part du MFDC par rapport à des faits et événements sont publiées par certains organes de presse sénégalais. Le MFDC lassé d’être accusé est sorti de son mutisme pour apporter des précisions mais également donner son point de vue concernant certains sujets d’actualité notamment sur le processus de paix.

Le Journal du Pays est allé au coeur du maquis casamançais à la rencontre du Général César Atoute Badiate et de son Secrétaire particulier Gérôme Diédhiou dit Ban Ki Mun.

Voici le récit exclusif de l’entretien croisé qu’ils ont accepté de nous accorder.

Mon Général, nous avons lu dans la presse que lors de la venue de Macky Sall  en Casamance, vous avez délégué grâce à l’intervention de Robert Sagna et du Cardinal Sarr des combattants accueillir le président du Sénégal. Qu’en est –t-il réellement ?

César Atoute Badiate :

 Je vous remercie pour cette question que je trouve très pertinente. Ce que je peux vous répondre c’est que je n’ai jamais envoyé de combattants pour accueillir Macky Sall. D’ailleurs je ne le reconnais même pas comme mon président.

Gérôme Diédhiou :

Comment peut on déléguer des combattants accueillir Macky Sall qui est un président que nous ne reconnaissons pas ?  Il est venu tromper les Casamançais, il prépare sa campagne électorale.

Qu’est ce qui vous a marqué dans son discours lors de son séjour en Casamance ?

César Atoute Badiate 

De  son discours,  j’ai pu retenir  ceci : Macky est venu faire de vaines promesses. Et s’il croit que c’est seul par le développement qu’il parviendra à régler le problème de la crise casamançaise, il est entrain de lourdement se tromper car ce n’est pas un problème de développement qui est à l’origine de la guerre en Casamance.

Gérôme Diédhiou :

L’analyse que j’ai faite du discours de Macky Sall est qu’il était venu en campagne électorale, il était venu faire de fausses promesses. Par ailleurs, je considère certains de ses propos comme une déclaration de guerre. Quand nous parlons d’indépendance, lui nous parle d’intégrité nationale, d’un Sénégal un et indivisible, c’est une déclaration de guerre et nos combattants en sont conscients et veillent sur tout ce qui bougent.

Macky Sall a invité le MFDC à faire la paix des braves c’est-à-dire ni vainqueurs, ni vaincus quelle est votre position ?

César Atoute Badiate :

Cette proposition m’a fait rire parce que  je sais bien qu’il est entrain de faire du sabotage et de tromper l’opinion. Certains qui l’ont écouté diront  qu’il a bien parlé. Mais y a t-il une guerre sans vainqueur ni vaincu ? Pour ce qui nous concerne, nous préconisons que pour résoudre le problème de la Casamance, il faut respecter des préalables.

C’est  d’abord la réconciliation entre combattants et les assises inter MFDC avant toute négociation avec le Sénégal.

Gérôme Diédhiou :

 Macky Sall ne respecte pas les gens, il croit que c’est parce qu’il a obtenu 23 milliards pour la Casamance que le MFDC va mettre de côté ses revendications pour venir s’associer à son processus de développement de la Casamance. Que vaut 23 milliards ? Développer la Casamance ce n’est pas 23 milliards mais  plusieurs milliers de milliards,  dites lui de cesser de nous  saboter parce qu’il n’aime pas la Casamance.

Prenez l’exemple de l’hôpital régional de Ziguinchor dont le scanner est tombé en panne depuis plusieurs mois. L’Etat a croisé les bras jusqu’à ce que Salif Sadio se soit proposé de le faire réparer. Et par orgueil son offre a voulu être refusée. Où sont les autorités ? Où sont les amis et amoureux de la Casamance ? Où sont les femmes de la plate forme, les mamans des casamançais ? Si  ce problème c’était produit dans un hôpital au nord du Sénégal la situation serait très vite décantée.  Mais comme ça se passe en Casamance on ferme les yeux.

Qu’en est –il réellement de l’avancement du processus de paix en Casamance ?

Gérôme Diédhiou :

Il y a beaucoup d’individus qui font croire qu’ils sont en relation directe avec le MFDC dans le cadre de la recherche de la paix. Ce sont ceux là qu’on appelle messieurs Casamance. Le président sénégalais est mal informé par ces gens. C’est comme du temps de Wade, ce sont ces mêmes personnes qui sont à côte de Macky et qui lui disent qu’ils sont en contact avec le MFDC et qu’ils préparent pour certains des forums et pour d’autres des conférences ou des retraites dans le cadre de la recherche de la paix. En réalité, ils préparent leur propre retraite. Ils ne donnent  pas la vraie information à leur président de la République. En réalité pour la plus part, on ne les a jamais vus ni reçus, on ne fait qu’entendre leurs déclarations.  Les mauvaises informations données aux président ont fait dire à Abdou Diouf en son temps qu’il allait régler le problème sans jamais y parvenir, Abdoulaye Wade avait promis de le résoudre en 100 jours et Macky Sall avait annoncé à ses tous débuts qu’il ferait de la crise casamançaise une priorité parmi ses priorité. Mais apparemment il semble se tromper dans la démarche car au lieu de chercher à négocier, il veut jouer à l’usure et bercer les Casamançais avec des promesses de développement sans lendemain. Il est entrain de duper la population comme l’ont fait ses prédécesseurs ; il tient un très beau discours, mais il n’agit pas. Il est entrain de mener la politique de l’usure. Figurez-vous que Macky Sall a remis le dossier casamançais à un militaire. Comment voulez-vous qu’un militaire négocie avec un militaire? Macky ne veut écouter personne. Il ne veut pas de la paix et il va échouer comme l’a fait Abdoulaye Wade.

César Atoute Badiate :

Macky a confié le dossier casamançais à plusieurs acteurs dont nous ne connaissons pas la plus part. Et pourtant ils déclarent nous avoir rencontré et obtenu des réponses favorables à leur programme à notre niveau. Je cite par exemple le cas des femmes de la plateforme,  j’entends parler d’elles à travers les médias. Une d’entre elles Seynabou Maal Cissé a soutenu lors d’une émission radiodiffusée à la RSI qu’elles sont venues me rencontrer dans le maquis pour me parler. Mais je tiens à dire qu’elles ne sont jamais venues vers moi. Ce n’est pas vrai et c’est pourquoi je ne les considère pas comme les mamans du MFDC, je ne les ai jamais rencontrées.

Quant à Amsatou Sow Sidibé, je ne la connais pas. Je ne l’ai jamais reçue, ni reçu son émissaire. Ce sont des femmes qui s’enrichissent sur le conflit et particulièrement sur le dos du MFDC. Nous avons tout compris.

Gérôme Diédhiou :

Le Général l’a déjà dit mais je reviens dessus pour appuyer que pour le maquis, la plateforme des femmes et Amsatou Sidibé sont des personnes qui cherchent de l’argent et c’est tout. Par exemple la plateforme des  femmes qui dit être les femmes, sœurs et mamans du MFDC, nous on ne les connait pas et jamais on ne les a reçues.

C’est pareille pour Amsatou Sow Sidibé, on ne la connait pas, on ne l’a jamais reçue. Quelle cesse donc de parler du MFDC et de parler en notre nom sinon un jour nous seront poussé à réagir. Il ne faut pas qu’elles nous utilisent pour s’enrichir. Nous avons entendu dire qu’elle se prépare à organiser une grande conférence sur le processus de paix au mois de Mai à Dakar. Je préviens les populations que c’est une démarche qui ne nous plaît pas et que nous réagirons ici en Casamance dès que nous aurons l’occasion. Il ne faut pas qu’elle s’enrichisse sur notre nom. Nous ne la connaissons pas.

Pour  ce qui concerne le MFDC,  nous avons choisi et  mandaté officiellement Robert Sagna, le Cardinal Sarr et l’imam Fansou Bodian de Bignona. C’est avec eux que nous travaillons même s’il n’y a pas de grandes avancés.

Depuis un certain temps, il est noté des « bavures » de militaires sénégalais ayant entrainées des morts d’hommes malgré l’accalmie notée et la volonté affichée de part et d’autre d’aller à la table de négociations. Qu’en dites-vous ?

Gérôme Diédhiou :

En tout cas nous avons donné un avertissement au gouvernement et que si jamais ces bavures se répètent, le MFDC va agir et très fortement. Même s’il faut compromettre l’accalmie et le processus de paix, car nous ne laisserons plus notre peuple se faire tuer comme des mouches. 

Et je reviens sur certains acteurs dont particulièrement la plateforme des femmes pour dire que quand des enfants de la Casamance ont été arrêtés  par incident, des démineurs que le Sénégal a conduit vers la mort et que Dieu merci le MFDC a compris le jeu, alors elles avaient organisé une grande marche dans les rues de Ziguinchor pour tout simplement obtenir des enveloppes auprès de l’Etat  et des bailleurs comme c’est le cas. Mais quand Antoine Sambou a été assassiné, on n’a pas vu où avait disparu cette plateforme des femmes? Était –t-elle décédée ? Tout récemment Abdou Bodian est tué, il a été torturé aucun acteur n’a bougé. Pourquoi quand on tu les casamançais les acteurs se taisent et quand c’est le MFDC qui réagit, ils se déversent dans les rues et vocifèrent dans les medias  pour condamner notre réaction. Je finis par dire que ces femmes travaillent pour le Sénégal et leur poches et non pour la paix.

Qu’est ce qui explique la pause des armes notée du côté des combattants ?

César Atoute Badiate :

Cette accalmie notée n’est pas le fruit d’un cessez le feu. Aucun acteur n’est venu négocier avec nous pour un dépôt des armes. Nous les avons déposées parce que c’est une façon pour nous de prouver que nous sommes engagés et disposés à négocier avec le Sénégal.

Il est dit dans la presse que César Atoute Badiate a levé son blocus sur le déminage suite à une médiation menée par Robert Sagna est- bien le cas ?

César Atoute Badiate :

Le problème du déminage, c’est la presse qui en a parlé. J’avais appris qu’après avoir libéré les démineurs, j’avais autorisé le déminage. Je profite de l’occasion pour dire que c’est faux.  Je n’ai jamais autorisé le déminage. C’est une décision irréversible car le déminage ne peut se faire qu’en temps de paix et non de guerre.

Gérôme Diédhiou :

On ne peut déminer qu’en temps de paix. Si de nos jours on démine et que des mines soient reposer, qui en sera l’auteur ? Ce sera pour faire d’autres victimes parmi les populations civiles. Le MFDC reste catégorique que le déminage ne se fera que quand il y aura la paix. C’est un dossier clos, on en reparlera le jour où il y aura la paix.

Si un  jour le Sénégal se décide à négocier, ou comptez-vous négocier puisque Macky Sall a déclaré ne pas se faire une fixation sur un quelconque endroit et qu’il est prêt a discuter avec le MFDC même à la planète mars ?

César Atoute Badiate :

Nous comptons désormais négocier en Amérique parce que j’ai remarqué la volonté du président Obama dont j’ai sollicité sa médiation d’aider au retour de la paix. Il a eu à envoyer un émissaire auprès de moi et je suis convaincu de sa volonté de s’impliquer dans le cadre de la recherche de la paix. C’est  pourquoi  le MFDC compte y tenir ses assises et je compte aller négocier aux Etats Unis.

Le MFDC s’est opposé à l’exploitation du zircon en Casamance, pouvez vous nous dire pourquoi une telle décision de votre part ?

 César Atoute Badiate :

Il ne faut  pas qu’on trompe les populations en leur faisant croire que ce projet leur sera bénéfique. Où est ce qu’ils vont habiter après? A la lune ? Nous avons rencontré de grandes puissances qui nous on expliqué les avantages et inconvénients de l’exploitation du zircon. Nous n’allons jamais autoriser une telle chose sur le territoire casamançais.

Prenez l’exemple de la RN6 ; aucun casamançais n’est inscrit dans le bureau de base de la reconstruction ; personne. Tous les grands chefs et décideurs proviennent du nord. Et si on exploite le zircon, la Casamance serait-t-elle bénéficiaire? Jamais. Il faut que les populations comprennent que l’exploitation du zircon va leur créer beaucoup plus de problèmes que d’avantages avec notamment la prolifération de plusieurs sortes de maladies. Au niveau du MFDC notre position est claire sur ce point. Nous considérons toute tentative d’exploitation  de ce zircon comme une déclaration de guerre.

 Propos recueillis par notre correspondant ESSINOR dans le maquis le 26 mars 2014

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