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Casamance: René Capain Bassène se prononce sur le blocus de la transgambienne, la crise en gambie et le processus de paix

Casamance: René Capain Bassène se prononce sur le blocus de la transgambienne,  la crise en gambie et le processus de paix

Journaliste, écrivain et fin observateur de la crise en Casamance ; René Capain Bassene se prononce sur :

– la ferméture de la frontière sénégalo-gambienne

– la crise interne en Gambie

– et l’évolution du processus de paix en Casamance.

Le Journal du Pays publie la première partie de l’interview.

René Capain Bassene depuis un assez long moment la Gambie a fermé ses frontières accentuant ainsi l’enclavement de la région naturelle de la Casamance. En tant que observateur averti du conflit ne croyez vous pas que cela pourrait avoir d’incident sur la crise ?

D’abord ; je tiens à apporter quelques précisions concernant certains faits que vous avez avancés en posant votre question. Je crois que dans cette histoire, ce n’est pas la Gambie qui a fermé ses frontières. Les autorités gambiennes ont sans préavis prise la lourde et unilatérale décision d’augmenter de manière que je juge exagérée les taxes sur les véhicules ; c’est en réaction contre cette décision que le syndicat des transporteurs sénégalais a décidé de barrer la route à tout véhicule entrant ou provenant de la Gambie. Si je ne me trompe je crois que ça s’est passé ainsi.

Malheureusement depuis ce blocage on ne sent pas tellement les efforts consentis de part et d’autre des deux nations dans le sens de résoudre très rapidement cet incident.

Pour moi c’est un incident engendré par un manque de communication et de diplomatie de part et d’autre. Je ne vois aucune relation entre une frontière fermée pour protester contre une hausse de tarif et son incidence sur le conflit en Casamance. D’ailleurs ce n’est pas la première fois pour les casamançais de vivre une telle situation.

Vous conviendrez avec nous que ce blocus est entrain d’avoir des conséquences très négatives sur les populations de la Casamance.

Certes, vous avez une part de vérité en le disant, mais il n’y a pas que les casamançais qui en sont victimes. Les premiers à souffrir de ce blocus sont les populations directement frontalières des rives de la Gambie a savoir une partie des habitants de la Casamance et une partie des populations de la région de Kaolack dont les activités vitales sont effectuées en Gambie. Il y aussi les populations gambiennes situées de part et d’autre de cette même frontière qui en pâtissent elles aussi.

Mais je précise quand même qu’au vu de la position géographique de la Casamance, les souffrances nées de ce blocus sont un peu plus atroces dans cette partie sud du pays. Pour rallier Dakar ou l’intérieur du Sénégal, c’est la croix et la bannière. Les tarifs ont doublé et la durée du voyage est devenue plus qu’indéterminée. Certains prix de denrées de première nécessité ont commencé a grimper dont par exemple le sucre dont le kilo en poudre varie entre 650 et 750 F CFA selon les endroits et celui en morceaux à 1000 FCFA dans la commune de Ziguinchor.

Ceci dit, je crois qu’il est temps que les autorités des deux pays engagent un véritable dialogue en vue de faire lever ce blocus.

Comment analysez-vous le fait que ce blocus soit provenu des transporteurs sénégalais ?

C’est une situation assez surprenante. Quand à la radio j’entendais le leader de ce syndicat demander au président Maky Sall de le laisser s’occuper de ce problème, de le laisser corriger en quelle que sorte le président Gambie, j’étais écœuré. Comment des camionneurs dans un Etat de droit comme le Sénégal ont-ils osé prendre une telle initiative sans que les autorités compétentes ne les raisonnent et les rappellent à l’ordre ? Est-il du ressort d’un syndicat quelle que soit la situation de prendre la décision de fermer les frontières d’un pays ? À mon avis je crois que les transporteurs sont allés un peu trop loin. Ils ont crée une situation qu’ils ne peuvent plus maitriser et qui de plus en plus est- entrain de prendre de l’ampleur au point de gravement nuire aux relations entre les deux Etats.

Il est clair que jamais les autorités Gambiennes n’accepteront de négocier avec les transporteurs. Aussi il faut contrairement à ce qu’on essaye de faire croire à l’opinion savoir que le pilier central de l’économie Gambienne n’est pas l’argent collecté au niveau de Banjul et de Farafégny. Si on croit que procéder par ce blocus c’est automatiquement asphyxier économiquement ce pays voisins c’est à mon avis trop le sous estimer. Ce blocus a ses conséquences au niveau des deux pays en commençant par les camionneurs eux-mêmes. En effet, ils sont les premiers à ne pas être enthousiastes à emprunter la voie de contournement. Ceux qui ont l’habitude de voyager par la transgambienne peuvent témoigner que des camionneurs préféraient passer une semaine à faire la queue pour la traversée du ferry en lieu et place de passer par Tambacounda.

Je termine par dire encore une fois que ces syndicalistes ont outre passé leurs prérogatives. Il ne leur appartient pas la décision ou non de fermer des frontières encore moins celle de négocier directement avec les autorités d’un autre pays.

A ce rythme, qui sait si demain le syndicat des pécheurs n’en fera pas autant en fermant la frontière maritime et terrestre avec la Mauritanie ? A ce que je sache, ils ne manquent pas du tout d’arguments pour le faire. Les pécheurs Guet – ndariens sont très souvent victimes des agissements des gardes de cote mauritaniens qui n’hésitent pas à arraisonner leurs pirogues , confisquer leurs matériels de pêche, à les imposer de lourdes amendes , à les faire emprisonner et même à ouvrir le feu sur eux sous prétexte qu’ils ont franchi les limites des eaux territoriales sénégalaises.

Mais contrairement aux camionneurs, ces pécheurs s’en sont toujours remis aux autorités compétentes qui avec diplomatie parviennent à entrer en contact avec les autorités de la Mauritanie et à régler dans l’amiable ce genre d’incidents. C’est pour moi la meilleure des démarches. Celle qu’il fallait adopté quand les autorités gambiennes ont décidé d’augmenter les tarifs et non de se laisser embourber par des syndicalistes. Ces derniers croient pouvoir régler par la force ce problème en optant pour un blocus dont l’objectif erroné est d’étouffer économiquement la Gambie en ne tenant pas compte des préjudices qu’ils sont entrain de faire subir aux pauvres populations dont les activités économiques principales dépendent de l’ouverture des frontières. Ils n’ont en tête que leurs uniques intérêts au risque de mettre aux prises deux pays frères.

Monsieur Bassene quels commentaires faites vous du refus des autorités sénégalaises de laisser Abdoulaye Baldé entrer en Gambie pour négocier la levée du blocus et la réaction des différents politiciens à son encontre ?

Je crois que le blocus au niveau de la frontière est une situation assez sérieuse et qui n’a rien d’avec l’environnement politique intérieure. A cet effet, je demanderai tout simplement à chacun de faire les choses selon son rang. On est en face d’un incident entre deux Etats. Laissons les autorités des deux pays concernés gérer cette affaire. Il faut surtout éviter que cette fermeture de la frontière devienne source de dissensions au sein des politiciens sénégalais qui en réalité ne peuvent individuellement rien régler.

Le Sénégal a encore et toujours son ambassadeur en Gambie et de nombreuses autres personnes représentant des institutions assez crédibles et qui pourraient s’impliquer au nom de l’Etat pour dénouer cette situation. Que les politiques ne s’en mêlent pas, tout comme les syndicalistes doivent être mis de coté et interdit de continuer prononcer des propos belliqueux à travers les medias.

D’aucuns ont préconisé le désenclavement de la Casamance comme solution afin de contourner la Gambie et ne plus vivre ce genre de problème qu’en pensez vous ?

C’est une bonne chose de penser à désenclaver la Casamance afin de permettre aux casamançais de rallier l’intérieur du pays sans revivre ce genre de problème. Mais convenez avec moi que ce n’est pas pour demain l’augmentation du nombre d’avions en destination de la Casamance accompagné d’une sensible baisse des tarifs. Ce n’est non plus pour demain des rotations de deux voir trois bateaux par jour vers Dakar ou d’autres localités du pays. Ce n’est toujours pas pour demain une autoroute Zig – Dakar ou encore un chemin de fer reliant la Casamance au reste du pays.

Ce ne sont que des esquisses de solutions, donc de pures et très simples projets agités çà et là. En attendant leur réalisation très prochaine ou très lointaine selon les avis des uns et des autres, l’urgence est de négocier la levée du blocus frontalier et la baisse des tarifs sur les véhicules sénégalais afin de permettre aux populations assez éprouvées par cet incident de voyager tranquillement.

Revenons-en à la Gambie. Ce pays est entrain de traverser une crise politique interne sans précédent. Beaucoup pensent qu’il se pourrait qu’il y ait des répercussions sur le conflit en Casamance qu’en pensez-vous ?

A moins que je ne comprenne mal votre question, je répondrai sans détour que je ne vois encore fois aucun rapport entre une crise politique interne en Gambie et sa relation avec la crise en Casamance.

La guinée Bissau a connue sa crise politique il y a quelques mois et rien ne s’est passé. Le MFDC n’est pas un « arbitre », il n’est pas «  gendarme » ni « un mouvement de mercenaires habilités à protéger ou déstabiliser des régimes politiques dans les pays limitrophes. Il n’est non plus pas l’ONU pour prétendre régler une crise politique de ce genre au sein de ces pays totalement indépendants.

J’espère que les hommes politiques gambiens parviendront par la grâce de Dieu à trouver une rapide solution a cette crise politique dont vous faites allusion.

Mais je crois qu’il est grand temps d’arrêter de semer la peur et d’installer une certaine psychose dans la tête des casamançais à travers de fausses informations et autre interprétations. Tantôt on évoque une imaginaire connexion combattante du MFDC et Djihadistes, tantôt c’est une reprise de la guerre à la suite d’une crise politique en Guinée ou Gambie. C’est des informations qui perturbent les populations. Les casamançais ont beaucoup souffert et souffrent encore du conflit qui prévaut chez eux depuis trente trois. Il ne faut pas leur en rajouter d’autres sources de traumatismes et de stress.

Pouvez vous nous dire où se situe l’évolution du processus de paix en Casamance ?

Le processus de paix est bloqué. Et sur le terrain les données ont changé. En ce 2016 aucune activité dans le cadre de la relance du processus de négociations n’a été menée à cause du fait que le MFDC surtout en son aile combattante a décidé de rompre jusqu’à nouvel ordre tout contact avec les facilitateurs ou autres médiateurs. Retenez que pour ce qui est du processus de paix, c’est le statu quo et c’est vraiment regrettable.

ARDiallo

A suivre…

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Commentaires (4)

  • Kolda Nafoure

    « En ce 2016 aucune activité dans le cadre de la relance du processus de négociations n’a été menée à cause du fait que le MFDC surtout en son aile combattante a décidé de rompre jusqu’à nouvel ordre tout contact avec les facilitateurs ou autres médiateurs » répond Mr. Bassène. Je constate que ces messieurs casamance s’intéressent à rencontrer les combattants du MFDC mais pas à l’armée sénégalaise ! Pourquoi ils refusent de parler avec les dirigeants politiques du MFDC? C’est cette question que ARDiallo doit poser à Mr. Bassène pour élucider le blocage du processus.

  • Kolda Nafoure

    « En ce 2016 aucune activité dans le cadre de la relance du processus de négociations n’a été menée à cause du fait que le MFDC surtout en son aile combattante a décidé de rompre jusqu’à nouvel ordre tout contact avec les facilitateurs ou autres médiateurs » répond Mr. Bassène. Je constate que ces messieurs casamance s’intéressent à rencontrer les combattants du MFDC mai pas à l’armée sénégalaise ! Pourquoi ils refusent de parler avec les dirigeants politiques du MFDC? C’est cette question que ARDiallo doit poser à Mr. Bassène pour élucider le blocage du processus.

  • Bantankouro

    Tant qu’il y aura de l’argent et des va-et vient dans le maquis, il y aura des saloperies et des divisions dans le maquis comme Tombon vient de dénoncer. Fort heureusement les combattants ont compris et ils s’affairent autour de leur unité dans tambour et trompette.

  • Tombon

    La plume de RCB vient de donner une appréciation passable de la situation. Cependant le fait que atika ferme les portes du maquis est un frein pour les vendeurs d’illusions ou des porteurs de valises d’argent pour diviser les combattants. Les facilitateurs ou négociateurs doivent à mon avis s’adresser à la branche politique du mouvement indépendantiste,

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