Casamance : L’heure de la rupture a sonné

Il y a des territoires que l’on ne peut pas dompter. Il y a des peuples que l’on ne peut pas étouffer. Il y a des douleurs que même le silence ne parvient plus à enfouir. La Casamance est de ceux-là. Et aujourd’hui, plus que jamais, elle réclame ce qui lui est dû : la liberté, la souveraineté, la fin de la domination sénégalaise.
Le vendredi 9 mai 2025, le Premier ministre sénégalais Ousmane Sonko s’est rendu à Bignona. Officiellement, pour participer au Gamou organisé par le guide soufi El Hadji Ousmane Fansou Bodian. Officieusement, pour tenter de contenir un feu qui ne s’éteindra pas avec des prières et des sourires creux. Car ce que Sonko est venu chercher en Casamance, ce n’est pas la paix. C’est le contrôle. Encore. Toujours.
Mais cette fois, les Casamançais n’acceptent plus. Ils ne veulent plus être traités comme une province rebelle à soumettre, mais comme un peuple digne à reconnaître. Et leur patience a atteint ses limites.
Depuis le début de l’année, la région est à feu et à sang. Mais ce n’est pas une guerre entre Sénégalais. C’est une guerre de libération, une guerre de résistance contre un pouvoir qui ne comprend que la répression et le mépris. Ce que Dakar appelle « sécurisation », c’est en réalité une occupation militaire. Et ce que l’on nomme « troubles à l’ordre public« , c’est le cri d’un peuple que l’on tente de faire taire depuis des décennies.
À Mongone, à Badême, à Kadialou, les attaques se multiplient. Les pertes humaines dans l’armée sénégalaise s’alourdissent. Des armes sont saisies. Un jeune officier, médecin-lieutenant, est capturé. Et l’État ? Il se tait. Il ment. Il se cache. Car la vérité est trop lourde à dire : le Sénégal ne contrôle plus la Casamance.
Et il ne la contrôlera plus jamais. Parce que cette guerre asymétrique, que le Mouvement des Forces Démocratiques de la Casamance (MFDC) mène depuis quarante ans, n’est pas un conflit de bandits ou de marginaux. C’est une guerre de libération nationale. Et comme toutes les guerres de libération, elle avance avec la force du terrain, du peuple et de la mémoire.
La population, elle aussi, se lève. Le 13 mai, Bignona est devenue ville morte. Non pas par crainte, mais par fierté. Parce qu’un gendarme a humilié le cortège d’un imam respecté, parce qu’un permis de conduire confisqué est devenu un symbole de trop. Les Casamançais ont compris. On ne mendie pas sa liberté. On la prend.
Les événements de Djibélor, du Festival « Undo Mayo » de Kabrousse, eux, ont révélé le vrai visage de la République sénégalaise : celui d’un pouvoir qui brûle les forêts pour faire taire les étudiants et les jeunes artistes. Celui d’un État qui torture des jeunes filles parce qu’elles réclament un avenir. Voilà ce que subit la jeunesse casamançaise : la trahison, l’abandon, la brutalité. Faut-il encore appartenir à un tel État ?
Le rejet du pourvoi de René Capain Bassène, condamné à perpétuité pour avoir voulu dire la vérité, est une autre preuve de cette répression systémique. Ce n’est pas la justice. C’est l’inquisition. On veut briser les voix libres. On veut effacer les témoins. Mais l’histoire, elle, ne s’efface pas.
Ce que le pouvoir central refuse d’admettre, c’est que la Casamance n’est pas sénégalaise par choix, mais par contrainte historique.
Cette Casamance, riche, fière, dotée d’une identité culturelle, religieuse et sociale propre, n’a jamais été intégrée — seulement dominée. Et comme dans toute colonisation, vient un jour le moment de la rupture.
Ce moment est arrivé.
Il ne s’agit plus de négocier une paix hypocrite avec un État illégitime sur cette terre. Il s’agit de bâtir une Casamance libre, souveraine, solidaire. Une Casamance qui regarde vers l’avenir sans chaînes.
L’heure n’est plus à la plainte. Elle est à l’action. À la revendication de nos droits historiques, de notre autodétermination. Le Sénégal a échoué. Il ne peut plus prétendre régner sur une terre qu’il ne comprend pas, qu’il n’aime pas, et qu’il humilie chaque jour.
À ceux qui résistent dans les forêts, dans les villages, dans les écoles, dans les mosquées et dans les rues, vous n’êtes pas seuls. Vous êtes l’âme d’un peuple debout. Et bientôt, vous serez les bâtisseurs d’un pays libre.
Emile Tendeng
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