Sahara Occidental : Entre droit international et réalités géopolitiques

Le droit international, les résolutions des Nations unies et les décisions des juridictions internationales telles que la Cour internationale de justice (CIJ) ou la Cour de justice de l’Union européenne sont souvent invoqués comme fondement de l’ordre mondial. Pourtant, leur application demeure très sélective, soumise aux intérêts stratégiques des grandes puissances. De nombreuses crises récentes, de l’Irak à la Palestine, en passant par la Libye, illustrent cette fragilité du droit face à la realpolitik.
Le cas du Sahara Occidental en est une illustration frappante. En 1975, la CIJ rendait un avis consultatif selon lequel aucun lien de souveraineté n’existait entre le Maroc ou la Mauritanie et le territoire sahraoui. Ce verdict allait à l’encontre des revendications historiques marocaines fondées notamment sur des allégeances traditionnelles de certaines tribus sahraouies. La Cour concluait que ces liens ne remettaient pas en cause le droit du peuple sahraoui à l’autodétermination.
Malgré cette décision, le Maroc initiait peu après la Marche verte, marquant le début d’un processus d’annexion du Sahara Occidental, soutenu par des puissances étrangères, dont la France. Des documents diplomatiques et des témoignages ultérieurs ont évoqué l’assistance militaire française, notamment par l’usage d’avions de chasse dans les premières phases du conflit. Ce soutien extérieur, combiné à l’occupation du territoire, a entraîné un déplacement massif de la population sahraouie et une colonisation progressive.
Un autre élément souvent passé sous silence concerne la reconnaissance passée des frontières par le royaume chérifien lui-même. Lors de l’indépendance du Maroc en 1956, les accords signés ne mentionnaient pas le Sahara Occidental comme partie intégrante du territoire national. Ce n’est qu’après le retrait de l’Espagne, sous la pression du mouvement indépendantiste sahraoui, que la revendication marocaine s’est affirmée plus vigoureusement.
Aujourd’hui, la situation reste gelée. Le Sahara Occidental est reconnu comme un territoire non autonome par l’ONU, en attente d’un processus de décolonisation. L’Union africaine reconnaît la République arabe sahraouie démocratique, alors que la position des pays occidentaux varie entre neutralité diplomatique, reconnaissance implicite du statu quo ou soutien indirect à Rabat, dans un contexte d’intérêts économiques et sécuritaires.
La question sahraouie soulève ainsi des interrogations profondes sur la cohérence de l’ordre international. Peut-on prôner le respect du droit international tout en tolérant des exceptions durables ? Peut-on soutenir un peuple en lutte pour sa souveraineté tout en fermant les yeux sur des situations similaires ?
Face à ces dilemmes, une chose demeure certaine : le sort du peuple sahraoui, comme celui d’autres peuples sans État, continue de dépendre moins du droit que de la volonté politique des acteurs influents sur la scène internationale.
ARDiallo
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