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Nigéria : la Cédéao fête ses 50 ans sur fond de turbulences régionales

Nigéria : la Cédéao fête ses 50 ans sur fond de turbulences régionales

Les chefs d’État et de gouvernement ouest-africains se sont retrouvés ce mercredi dans la capitale économique nigériane pour célébrer le cinquantenaire de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (Cédéao). Mais derrière les fanfares, le bloc régional fait face à la crise la plus grave de son histoire.

Trois de ses membres fondateurs — le Mali, le Burkina Faso et le Niger — ont claqué la porte en janvier, emportés par des juntes militaires qui reprochent à l’organisation son manque de solidarité face aux menaces sécuritaires et ses sanctions jugées « injustes ». Leur retrait a donné naissance à l’Alliance des États du Sahel (AES) et laissé la Cédéao amputée de près d’un million de kilomètres carrés de territoire.

« Nos nations sœurs pourraient, avec le temps, reconsidérer leur décision », a lancé le général Yakubu Gowon, cofondateur de la Cédéao et ancien chef d’État nigérian, devant quelques centaines d’invités réunis dans un hôtel de Lagos. « Les liens historiques et culturels demeurent intacts ; j’ai la conviction qu’elles reviendront plus fortes. »
Le ministre nigérian des Affaires étrangères, Yusuf Tuggar, affiche le même optimisme : « L’AES n’est pas une rupture définitive ; tôt ou tard, le trio fera sa rentrée. »

Une organisation fragilisée

Optimisme que ne partagent pas tous les observateurs. Pour Kwesi Aning, expert ghanéen au Centre Kofi Annan, le départ des trois pays « porte un coup à la crédibilité de la Cédéao, jadis symbole d’intégration ». Un rapport publié ce mercredi par le cabinet nigérian SBM Intelligence souligne également la « faiblesse » du leadership d’Abuja, miné par une crise économique persistante, l’extension de l’insurrection de Boko Haram et des contestations politiques.

Le spectre jihadiste

Sur le front sécuritaire, la situation reste explosive. Le Sahel a été classé en 2024 épicentre mondial du terrorisme pour la deuxième année consécutive, concentrant plus de la moitié des morts enregistrées dans le monde, selon l’Indice du terrorisme mondial. Ces derniers mois, le Nigeria et le Bénin ont encore essuyé une série d’attaques jihadistes, accentuant la pression sur des armées déjà débordées.

« Il est normal qu’une institution traverse des phases de crise », nuance cependant l’ancien Premier ministre guinéen Lansana Kouyaté, ex-secrétaire exécutif de la Cédéao. « L’essentiel est de s’évaluer périodiquement pour se réaligner sur la réalité du moment. »

Un jubilé à la croisée des chemins

Créée le 28 mai 1975, la Cédéao affichait à l’origine l’ambition de dynamiser les échanges intracontinentaux et de promouvoir la stabilité démocratique dans une région secouée par des putschs à répétition. Cinquante ans plus tard, elle doit convaincre qu’elle reste le cadre de référence pour résoudre les crises.

Au terme de la journée d’anniversaire, les dirigeants se sont engagés à « poursuivre le dialogue » avec le Mali, le Burkina Faso et le Niger et à « renforcer la coopération sécuritaire » entre États membres. Reste à savoir si ces promesses suffiront à ramener le trio sahélien dans le giron ou à endiguer la spirale de violences qui menace le cœur même du projet ouest-africain.

Saliou Cissé

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