(Walf.sn) – La Casamance connaîtra-t-elle un jour la paix, négociée à partir d’un processus de dialogue incluant tous les protagonistes du conflit ? On l’espère. Mais les propos de Macky Sall, tenus vendredi dernier, ne participent pas à accélérer le processus du dialogue. Macky Sall a déclaré la Casamance n’aura jamais son indépendance. Ce qui, aux yeux de Mamadou Nkrumah Sané, constitue une rupture dans le début de contacts que l’Etat du Sénégal est en train de nouer avec les différents protagonistes du Conflit. Il affirme que Atika, la branche militaire du Mfdc, a bien enregistré ces propos du président de la République.
La sortie du président Macky Sall sur la Casamance va-t-elle plomber les débuts de contacts avec le Mouvement des forces démocratiques de Casamance (Mfdc) ? On peut le craindre d’autant plus le président de la République remet en cause le fondement même de l’existence du mouvement indépendantiste : l’indépendance de la Casamance. Le chef de l’Etat a averti en soutenant que le Sénégal est prêt à discuter de toutes les revendications du Mfdc, sauf la question de l’indépendance. «La Casamance ne peut pas avoir son indépendance du Sénégal.  Ce n’est pas possible», rapporte le journal Le Quotidien dans son édition du week-end, ajoutant qu’il est ouvert au dialogue sur toutes les autres questions allant même à proposer le modèle d’organisation administrative des Landers allemands et suisses. Interrogé, Mamadou Nkrumah Sané ne fait pas dans la dentelle : «Je pense que Atika a bien enregistré la déclaration de Macky Sall et sait ce qui l’attend en Casamance», réagit-il. Nkrumah Sané estime que la Casamance a toujours été un «problème» pour les dirigeants sénégalais sans jamais avoir une solution pacifique. Pour lui, Macky Sall et ses prédécesseurs n’ont eu qu’une «seule solution : la solution militaire». «Cela va continuer avec Macky Sall comme il l’a toujours été. Comme le président Macky Sall l’a dit, la crise casamançaise ne trouvera solution que dans l’action militaire».
Quand on lui rétorque que le chef de l’Etat s’est dit en même temps ouvert au dialogue, le secrétaire général contesté du Mfdc et représentant de l’aile extérieure du mouvement irrédentiste, apporte cette réponse cinglante : «Prôner le dialogue en traçant une ligne rouge démontre qu’on ne veut pas dialoguer. Si c’est comme ça qu’il compte régler cette crise, il s’y est mal pris alors». Sur le modèle des Landers allemands et suisses, Nkrumah Sané estime que ce n’est qu’une reprise des propositions de la France. Avant d’ajouter : «Ce n’est pas au président de la République du Sénégal d’imposer ses solutions et les frontières de la colonisation. S’il doit y avoir dialogue, ce sera avec les Casamançais et non pas imposer une solution. D’ailleurs, il a rompu le dialogue avec cette déclaration qu’il a faite. La seule solution qu’il propose alors, c’est la solution militaire». Même si le chef rebelle considère que la porte du dialogue n’a jamais été «ouverte».
Quant à l’amorce de dialogue ouverte par Robert Sagna, Nkrumah Sané reste sceptique quant à sa poursuite. «Je pense que Robert Sagna devait être sidéré quand il a entendu ces propos de Macky Sall. Il sait ce qu’il doit faire maintenant : rester tranquille chez lui». Il pense que ce sera la même attitude que devraient prendre les cadres casamançais qui commençaient à s’agiter pour booster le processus du dialogue. «Il ne sert à rien d’envoyer quelqu’un pour rencontrer Nkrumah», fait-il savoir. Pour Nkrumah Sané, cette sortie de Macky Sall ne l’a pas surpris. Il rappelle que c’est le même Macky Sall qui avait soutenu que même en faisant la guerre pendant 400 ans, la Casamance n’aura pas son indépendance. Le président de la République, alors candidat à l’élection présidentielle de 2012, avait aussi promis un cessez-le-feu unilatéral en Casamance, s’il était élu. Une promesse, selon M. Sané, qu’il n’a pas respectée.
Walf / Recueilli par Saliou Cissé